[OS] Polly .

Loitsche, décembre 2004

C'est un soir gelé d'hiver que tout a commencé. Pardon, que tout s'est terminé.

Adossé contre un cerisier enneigé, la mine renfrognée et les mains enfoncées dans les poches de son Jeans troué, un garçon aux cheveux noirs attendait sous les nuages blancs crémeux du ciel d'Allemagne. Le ciel prit alors une teinte veloutée et il ne tarda pas à neiger. L'adolescent se mit à grelotter de froid et ses lèvres prirent une couleur violacée, mais hormis ses dents qui claquaient, il ne bougeait pas, il resterait là à l'attendre jusqu'à ce qu'elle vienne. Il avait à présent baissé la tête et se concentrait sur ses baskets sales pour éviter de penser au fait qu'il était en train de mourir littéralement de froid. Il redressa cependant le regard, l'oreille aux aguets, quand il entendit des pas se rapprocher. C'était elle, il en était certain. La neige crissait sous les pas des bottes noires de la jeune fille. Elle courrait. Un sourire se dessina sur les lèvres du garçon. Il imaginait déjà Polly, son bonnet marron et rose vissé sur sa tête blonde. Il voyait déjà son sourire ; le sourire de Polly c'était le genre de sourire qui pouvait remplacer le soleil dans la vie de n'importe quel garçon de quinze ans. Elle était jolie, Polly. Ses yeux gris riaient tout le temps. Polly, c'était son carré de ciel bleu, son arc-en-ciel, son ange personnel. Tout ça à la fois.

Ecoute.

Son coeur fit un bond dans sa poitrine quand il vit la jeune fille essoufflée d'avoir trop couru et pliée en deux, essayant de reprendre son souffle. Quand elle se redressa, elle courut directement se jeter dans les bras du jeune homme.
Ses yeux ne riaient pas, cette fois là.

Il serra Polly dans ses bras alors qu'elle enfouissait sa tête dans le cou de l'adolescent. Puis le silence. Trente secondes ; une minute ; deux minutes s’écoulèrent. Et puis un sanglot. Le garçon se détacha un peu d’elle et remit une de ses mèches blondes derrière son oreille.

« Hey Polly… » Son ton était un mélange d’inquiétude avec une pointe de tristesse. Malgré tout, il se voulait rassurant.

« Bill, c’est la dernière fois qu’on se voit, n’est ce pas ? » Ses sanglots redoublèrent d’intensité. Inutile de préciser que la question de Polly était rhétorique.

♦ Rhétorique, adj. : Qui n’attend pas de réponse.

Bill baissa la tête, affligé par les paroles de Polly. Un voile de tristesse se posa sur son visage. Quand sa mère lui avait annoncé qu’ils allaient déménager, c’était pire que tout. Comme un couteau qu’on lui aurait planté dans le ventre et qui n’aurait de cesse de se retourner dans la plaie béante. Son visage se crispa de douleur. Polly venait d’enfoncer l’arme plus profondément encore. Il avait l’impression de se vider de son sang. Il comptait lui parler, il voulait lui dire qu’il allait partir, qu’il n’allait jamais revenir, mais il n’avait pas pu, il n’avait pas réussi. Le poids tout entier de la culpabilité s’était installé sur ses épaules. Il plongea ses yeux chocolat dans les grands iris gris de Polly. Il appuya ses lèvres glacées contre le front brûlant de la jeune fille. Celle-ci ferma les yeux et Bill l’implora, la voix tremblante.

« Excuse-moi ; Pardon. Je voulais t’en parler, mais je n’ai pas pu. Pardonne-moi. Tu m’en veux ?
_ Non, je ne t’en veux pas. Comment pourrais-je ? »

Elle avait arrêté de pleurer mais gardait les yeux fermés. Elle était allée se nicher dans le cou du jeune homme. Elle continua.

« Tu pars dans une heure. »

Polly se défit de leur étreinte et se grandit sur la pointe des pieds pour faire un bisou sur le nez de Bill. Elle poursuivit.

« Je t’aime. »

Et elle partit comme elle était venue, c'est-à-dire en courant. Elle se retourna cependant une dernière fois avant de lui crier un :

« Cap de pas m’oublier ? »

Bill répliqua à son tour.

« Bien sûr ! Je t’aime Polly chérie ! »

Et il la vit s’en aller dans le bleu de la tombée de la nuit. Il se murmura pour lui-même :

« Je pourrais te haïr, ne me demandes pas de t’oublier. »

Paris, juin 2008

• Des grands yeux gris gonflés de larmes ;
• Des yeux chocolat cruels et arrogants.

Polly sirotait tranquillement son Coca Cola, assise en tailleur sur un des bancs étant disposés près de la tour Eiffel, elle laissait le liquide glacé s’emparer de l’intérieur de sa bouche puis descendre dans sa gorge en sentant les bulles de gaz de sa boisson lui picoter la langue. Elle observait les passants depuis un bon moment déjà, sans éprouver aucune lassitude.
Cet été, les Tokio Hotel étaient à Paris, histoire de faire exploser la capitale le vingt-et-un juin deux mille huit, voyez.
Cela faisait quatre ans que Bill, son frère et leurs deux potes étaient partis, la laissant derrière eux. La jeune fille secoua la tête comme pour chasser les souvenirs qui la submergeaient puis elle releva le regard ; et c’est là qu’elle le vit, Lui. Avec ses lunettes de soleil et sa casquette, la tête fièrement redressée et cet air arrogant qu’elle ne lui connaissait pas.
Au milieu de tous ces gens ignorants, Polly restait là dans un état comateux, comme si on l’avait frappée d’une force invisible. Elle se leva cependant de son banc, abandonnant alors sa boisson sur celui-ci. Elle alla à la rencontre du jeune homme, hésitante. Elle se mordait violemment la lèvre inférieure pour tenter de calmer les pulsions de son cœur et un peu de sang fit son apparition sur les muqueuses endolories de la jeune fille. Quand Polly se retrouva devant lui, le fixant de ses grands yeux gris, elle prit maladroitement la parole.

« Bill ? »

Ca, c’était stupide.
« Oui c’est moi. Un autographe ? »

Polly restait figée, frappée en plein cœur. Comment avait-il pu oublier ? Elle reprit la parole, sa voix tremblant légèrement, elle flanchait.

« Bill, c’est moi. C’est Polly ; tu te souviens ? »

Lueur d’espoir à la con.

« Je ne connais personne de ce nom là, je regrette. » C’était lâché du bout de ses petites lèvres cruelles, avec tout le dédain qu’un garçon de dix-huit ans pouvait contenir.

Les larmes commencèrent à tracer leur route sur le beau visage fin de Polly. Elle tourna le dos et partit en courant, avant de se retourner et de siffler entre ses dents un :

« Cap de pas m’oublier, hein ? »

Et puis soudain, Bill se souvint. De tout. De ses grands yeux gris, de ses cheveux blonds qui volaient au vent. De son sourire. D’elle.
Son ventre se tordit, il tomba à quatre pattes par terre.

« Polly ! » Son cri déchira l’air des soirs frais de Paris.

Mais elle était déjà partie en courant dans le bleu de la tombée de la nuit.
Puis sa voix se cassa dans un murmure.

« Polly… »

Éternelle répétition.

C'est beau , j'aime

Avec la chanson c'est plus que émouvant c'est horrible .

Thaanks !

Sublime.
Mais putain,sublime .

J'en ai eu des frissons. Magnifique.

Chouquuuuuette .
J'l'avais d'ja lu, mais ça fait un bien fou de la relire .
Cette fois j'ai eut tout mon temps !*happy*

Waouh, elle sont bien les modif' .
J'aime

Zouuub' .

Huuuu merci les gens ^^

Chou : Oui, cette fois t'as eu tout ton temps
Merciiii .

J'aime.
Surtout les passages qui insistent sur l'arogance de Bill.
Je raffole de fictions, ou OS où Bill est Arogant, méprisant.
Merci. =)

p*tin dsl je vais répéter mais : c'est magifique ! j'adore cet OS il est très beau, j'aime beaucoup ces genres là j'ai meme verser une larmichette alors ! ^^ bravo et merci pour cet oS !

Merci beaucoup .