Les lignes blanches défilent inlassablement et à une vitesse folle...
Mes yeux se fatiguent et mes pieds tremblent dans la gorge de ce monstre à pédale. Le soleil s'est couché bien trop tôt et n'a pas pris le temps de m'attendre. Je freine un peu, ou trop brusquement puisque ma tête penche en avant, ma Cadillac roule à vive allure, seule entre mes doigts, miséreuse spectatrice de notre future écart.
Notre étreinte a duré bien trop tard, et mon corps fatigué en paye le prix, elle doit déjà avoir appelé la terre entière « Tom Kaulitz vient de me tringler. » quelle bonne et heureuse nouvelle, te voilà comblée.
Dans les bras d'une ravissante brune il y a moins d'un quart d'heure, Grunie...Me voilà dans les bras de ma splendide mère porteuse. Elle glisse, file et transperce le mur du son à ma seule demande, le pouvoir dans les mains, la poudre aux yeux, l'arme serré entre les doigts...
Le bitume s'enchaîne toujours et n'en finit plus, seul un homme trompé par sa virginité depuis bien trop longtemps peut se trouver là à cette heure tardive de la nuit. Les falaises ont commencé et mon corps chancèle au rythme des virages. Seulement...
Mon petit frère doit s'en doute dormir les yeux ouvert en attendant mon retour, mais le destin en aura décidé autrement, ce soir est un certain soir et demain est un autre jour.
Je fixe le bout de la route au gré du virage, une étendu d'eau au loin, des crevasses au plus près et cette herbe fraîchement recouverte de neige sur le bas côté, puis une silhouette. Je ralentit l'allure, je contrôle mon bolide, j'écarquille les yeux...Une âme en peine, seule, perdue à des kilomètres à pieds de ce que l'on peut appelé la ville la plus proche.
Je me stoppe à quelques mètres et reste immobile quelques instants. Mes phares éclairent le corps inanimé d'une stature humaine assise à même le sol. Cette personne ne bouge pas, ne se retourne pas, ne prends pas la peine de me regarder, la naïveté se fait sentir à plein nez. Sans plus attendre, je sors du véhicule et prend bien soin de claquer derrière moi la porte ne serait ce que pour apercevoir ce visage dissimulé sous un sweat noir d'indifférence...
Mon acte n'a aucun effet et je commence à perdre patience, je m'avance lentement tout en frottant mes baskets contre le sol...
Tom : Hey ? Salut...
J'ai toujours su que les murs étaient plus bavards qu'une âme amer...
Tom : ça va ?
Tout en m'approchant, je réussis à percevoir un bref hochement de tête qui me rassure, cependant le silence règne toujours en maître. Je ne suis plus qu'à un mètre de ce corps fragile, je peux maintenant détaillé le contour de ses doigts et la courbure parfaite de son dos. Les quelques bagues et la finesse de ses pieds nu me font penser à une femme, on ne m'y prendra pas, j'en suis certains, je les connais trop bien pour ça. L'homme veut toujours en savoir un peu plus...
Tom : Je peux m'assoir ?
Comme je le savais, ma seule réponse est celle du vent et de quelques flocons qui s'accrochent au sol entre elle et moi. Je m'assois sans préavis et attends quelques instants...Elle est recroquevillée,le visage entre ses genoux, quelques mèches de cheveux retranchés vers l'avant...Moment terrifiant de sensibilité...
Tom : Tu es perdue ?
J'aurais voulu connaître les traits de son visage, j'aurais voulu connaître la pureté de sa voix...En vain...
Je passe mes mains autour de mes jambes et entame un monologue
Tom : Il est tard, je suis aussi seul que toi sur cette route, sauf que j'ai la chance d'avoir une langue et une sociabilité à toute épreuve...Je passe souvent par ici le soir, et jamais je ne t'y ai vu, le hasard fait sans doute bien les choses, mais les circonstances inhabituelles de la situation me racontent que ton destin s'est foutu de toi...
Un sanglot s'échappe de sa gorge et me renvois en plein visage la tristesse du monde et de cette nuit.
Tom : Je sais que parfois la vie peut divorcer du bonheur mais rester seule ici la nuit n'est pas un endroit pour une fille seule...Je peux t'emmener tu sais ?
Alors que j'observe les répercussions de mes paroles sur les quelques vagues qui viennent de s'écraser sur la roche dans un silence magistrale, je souris devant le ridicule romanesque de la scène, tout semble paisible et pourtant si oublier par le temps, elle la première...Plus monocorde que jamais...
Une main délicate se pose sur mon avant bras nu, elle est froide et tremblante, elle est douce et timide...Elle est ce qu'elle est...Je la regarde fixé ses phalanges dans ma peau puis retient les quelques souffles que je lui prête s'envoler vers le ciel...
... : J'aime la nuit...
Tom : Quelle drôle d'idée...Mais quelle genre de personne peut réellement l'aimer ?
... : Le genre de personne que je suis...
Tom : Tu ne veux vraiment pas que je te ramène ? Il fait vraiment trop froid...
... : Regarde mes pieds...Ils sont tristes...
Tom : Je dirais plutôt bleus et frigorifiés !
... : Ne cherche pas à donner un sens à tout...
Sa voix est cristalline, comme mon inconscient me l'avait décrite, je n'ai toujours pas vu son visage...La simplicité de ses dires font d'elle un tendre souvenir encore dans le futur...
Tom : Il est vraiment tard...
... : Alors pourquoi tu as pris le temps de t'arrêter...Non, ne réponds pas, je n'aimerais pas ça...
Tom : Je me demande pourquoi une fille est assise là, seule, dans la nuit, dans un froid pareil, les fesses dans la neige...
... : Parce que pourquoi pas ? Tout le monde a ses problèmes, et pour info, tu as aussi les fesses dans la neige...
Tom : Ouai, j'avais senti...
Je m'étire dans un froid étrange, malgré mes bras nu je ne ressens pas le froid douloureux qui te crispe d'ordinaire. Elle frissonne et relève son visage, une capuche m'empêche de pousser plus loin mes investigations tandis qu'elle sort un mouchoir de sa poche arrière. Elle le passe derrière ses mèches et essuies ce que je devine être quelques pleures...
Tom : Pourquoi des larmes ?
... : Tu es trop curieux...
Tom : Peut-être...Ou peut-être pas...
Nous reprenons nos droits et engageons un nouveau silence...
La nuit est paisible et le visage de Grunie me revient, elle que je vois depuis deux ans maintenant, elle est belle Grunie, mais l'intelligence l'a oublié...Elle ne me parle jamais de la vie, elle me parle juste d'elle. Mais le meurtre de sa conscience ne serait il pas de lui avouer qu'elle serait beaucoup plus belle silencieuse...Non, la raison me hurlerait qu'elle est trop attirante au lit pour se taire...
Je me tourne vers la jeune fille qui regarde maintenant l'étendue d'eau qui nous fait face, elle passe une main sur une mèche de ses cheveux et écarte délicatement sa capuche, je ne cligne plus des yeux...
Est ce possible que la beauté douloureuse existe ? Celle que tu observe le regard plissé avec les yeux qui brûle, celle qui dans le reflet de la lune, prend tout son sens et lui vole son éclat...L'inexplicable beauté implacable et évidente...
Je retiens mon souffle chaud et gonfle mes joues dans un ultime effort, la vie est belle et la femme inconnue est parfois parfaite...Elle ne semble pas me connaître, elle ne me jugera donc pas, la situation semble me deviner en tout point, la réalité m'oublierais déjà...
... : Tu aimes la vie ?
Tom : J'aime ce que j'ai fait de ma vie...
... : C'est une nuance terrible tu sais...Mais une belle nuance.
Tom : Tu n'aimes pas ta vie ?...
... : Je ne sais pas, peut-être plus maintenant...
Tom : On a peut-être mal fait les choses pour toi...
... : Non, fais ce que ton corps te dicte et ne te retourne pas, la claque n'en serait que plus violente...Je vois les choses comme ça...Tu sais que quelqu'un là haut jouit de nos malheurs jours après jours et que le monde lui implore bonté et louange, le paradoxe n'en est que plus drôle...J'aime croire que j'ai une avance sur mon destin, même si je sais pertinemment qu'il me rattrape toujours...Donc on ne m'a pas mal fait les choses, on m'a juste laissé en plan un moment...Mais la roue tourne...Comme ce soir...
Tom : Qu'est ce que tu veux dire ?
... : Je sais pas...
Elle tourne son visage vers moi et pour la première fois son regard croise le mien...Ses yeux sont grands, ouverts sur le monde qui nous entoure, encore innocent et tremblant de sincérité...Elle m'a jeté cette phrase à la figure sans me préparer à la vague de rancœur qui me submerge et me noie. Je fais ce que mon corps me dicte, mais me retourne toujours...La claque est parfois cinglante et t'arrache un cris d'effroi, mais la vie est faîte comme ça...Un ange passe, elle ressemble à ma Grunie...
Tom : Tu viens d'où ?
... : D'ici et là bas...D'un peu partout...
Tom : C'est tellement facile de dire ça...
... : Et toi ?
Tom : De la ville d'à côté, d'un lit pas trop loin...
... : Je me serais volontiers passée de ce détail...
D'un geste de recul, elle porte son visage en arrière, respire longuement l'air frais de la nuit tandis que j'observe la pureté de son cou encore bercé de sa chaleur naturel...L'envie d'y perdre mes lèvres est intense mais mon caractère m'en dissuadera amèrement...
Tom : Tu viens souvent ici ?
... : Tout les soirs...
Mon étonnement se fait violence, je n'ai jamais pris la peine d'observer le bas côté, l'amertume d'être passé trop près du bonheur m'emmène encore un peu plus bas...
... : Je t'attendais...
Tom : Quoi ?
... : Tu as très bien compris...
Tom : Je ne comprends pas...Tu viens tout les soirs ici pour m'attendre...?
... : Pour te faciliter les choses, je ne répondrais pas...
Tom : Mais comment sais tu ?
... : Quand on veut, on est capable du pire...Pour avoir le meilleur...
Je la regarde incrédule, jamais je ne me serais douter d'un tel acte de sa part...
... : Tom, cesse de t'abandonner à tes pensées, assume simplement tes dires et profites de cette seconde qui passe et qui s'égraine déjà...Tu as le choix, rester ou partir...Si tu pars, je ne te suivrais plus, seulement à une seule condition...
Tom : Laquelle ?
... : Si tu n'oublies jamais qu'un jour, une Mélodie qui t'aimes à en perdre ses notes à croiser ta route une nuit les pieds dans la neige...Seulement si tu pars...
Tom : Oui ?
Mélodie : Je laisserais mes pieds se congeler dans la neige pour ne jamais quitter cet endroit où quelques flocons sont tomber entre toi et moi...
Tom : Ce n'est pas un choix que tu me laisses là...
Le destin est troublant presque effrayant, elle qui faisait ombre à la lune fait maintenant l'éclipse totale de mon soleil, je ne sais que faire, ne sachant que dire...Mélodie ou mon assassin...
Mélodie : N'oublies pas que la neige a toujours fondu au soleil...
Tom : Et qui te dis que le soleil se lèvera demain si je pars sans toi, la roue ne tourne pas toujours dans le bon sens...
Mélodie : Si la roue ne tournait pas déjà dans mon sens, tu ne serais pas là...
Tom : Peut-être...Mais seulement...Pourquoi tu pleurais quand je suis arrivée ?
Mélodie : Dans mes cauchemars, je voyais déjà ta voiture passée tout droit une nouvelle fois...Sans que tu ne daigne cesser de rouler...Et le chapitre qui recommence...Indéfiniment...Inévitablement...
&
A quelques kilomètres de là, une jeune femme brune et élancée rentre dans la chambre de sa petite sœur disparue...Une dispute, ses derniers mots et un adieu...
Elle aurait pourtant pu lui avouer que si ce jeune homme passait dans son lit plusieurs soir par semaine, s'était pour la protéger, pour qu'il ne passe pas dans sa chambre à elle...
Grunie n'avait jamais eut un semblant de cœur, juste un petit morceau d'amour réservé à sa petite sœur...La jolie Mélodie...Pourtant la trahison fut immédiate, Grunie n'arrivant pas à persuader la petite sœur que non, son innocence n'est pas un mal, que des guitaristes moins connu, moins beau et bourré d'amour à revendre, elle en trouverait pleins, parce qu'elle est belle Mélodie.
Seulement Mélodie avait voulut celui là, quitte à en payer le prix...Jamais il ne l'avait vu dans la maison familiale, mais elle savait qu'un jour elle croiserait sa route, seule, dans le temps, mais pas ici...
Avant de quitter la maison, Mélodie avait laissé un mot à l'intention de sa grande sœur :
"Grunie...
Courir après lui, comme courir après la vie...
.M."
Puis elle est partit...
De son côté, Grunie a continué de voir Tom, juste pour se punir d'avoir faillit, la douleur la rongeant et le regard larmoyant, jamais elle n'avait poussé un cris de plaisir, toujours elle avait hurlé de chagrin, lui sur elle, elle sous lui...
Et le souvenir après la vie...
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