À la croisée des cheminsNouvel album avec une nouvelle atmosphère, nouvelle tournée, nouveau look pour le leader, Bill Kaulitz... Les fans vont-ils suivre ce renouveau? Tokio Hotel démarre sa tournée à la Rockhal, fraîchement «awardisé» par les chaînes musicales du continent et avec un nouveau concept. Rien ne garantit le succès. Alors que leur précédent passage à la Rockhal, en 2008, vit des fans squatter devant la salle toute la journée pour avoir les meilleures places, il reste toujours des tickets moins d'une semaine avant leur show. / De Christian Knoepffler (Le Républicain lorrain)Le timbre de la voix a ce petit écho métallique qui colle parfaitement avec le titre du nouvel album, Humanoid. Comme si à l'autre bout du fil, notre correspondant n'était rien d'autre qu'un robot. Mais un robot auquel il faut montrer patte blanche pour accéder au saint des saints. C'est un rituel qui porte la marque distinctive du succès planétaire: après avoir composé un numéro en Allemagne, vous devez enchaîner avec un code d'accès à la «salle de conférence», puis décliner votre identité à un manager qui, d'un ton inflexible de manager-robot, vous annonce que vous disposez très exactement de sept minutes pour vous entretenir avec le groupe... Sept minutes? En d'autres circonstances, la frustration l'emporterait. Avec Tokio Hotel, c'est suffisant pour faire le tour de la question.
La remarque n'a rien d'injurieux. Au contraire : nos quatre garçons dans le vent se montrent affables à souhait et jouent le jeu sans rechigner. Ils sont si parfaits dans leur rôle qu'on en vient à se dire que leur univers, leurs centres d'intérêt, leurs ambitions personnelles se limitent vraiment à ne faire que de la musique, puis à l'interpréter devant le plus grand nombre de fans possible. Avant de rentrer à l'hôtel. Comme lorsqu'ils avaient 16 ans... Sauf qu'ils ont entre 20 et 23 ans, et qu'on aimerait savoir, par exemple, ce que ces enfants de la réunification pensent de l'Allemagne d'aujourd'hui : «Bof, tu sais, on ne l'a jamais connue autrement! Bien sûr, on a chopé quelques trucs au passage quand on était mômes, mais sans plus», bafouille Bill. À moins que ce ne soit Tom, car dans le brouhaha de la salle de conférence, les deux frères Kaulitz ont à peu près le même timbre de voix. Seule certitude : Georg (basse) et Gustav (batterie), fidèles à leur image, se cantonnent aux rôles de témoins muets. Sont-ils présents? Pas sûr.
«L'envie de conquérir les foules»Ce dont on est sûr par contre, c'est que Tom (guitare) se charge d'évacuer la traditionnelle question de «l'influence majeure», de l'étincelle qui a poussé ce petit monde à se lancer dans le grand bain: «C'est notre beau-père qui nous a branchés sur la musique. Il est lui-même guitariste... Quand j'avais 7ans, par là, j'ai commencé à grattouiller sur ses guitares. Un peu plus tard, on jouait déjà dans des fêtes. Nous avions juste envie de devenir les meilleurs, de conquérir les foules!» Bill prend le relais : «Ouais, nous voulions avoir un jour les moyens de monter une tournée comme celle que nous allons démarrer? Avec une équipe hyperprofessionnelle et plein d'effets spéciaux.»
OK, message reçu. Le nouvel album marque un vrai tournant musical. Pourrais-tu nous expliquer la démarche, Bill? «Bon, c'est simple... Au départ, nous voulions prendre un peu de recul, on en avait un peu marre d'être constamment sous les projecteurs. Et puis, on s'est dit que le moment était peut-être venu de repartir de zéro... On a pris le temps de tester différents trucs, d'essayer des tas de pistes, et on a fini par aboutir à ce concept, Humanoid. Plus électronique que par le passé, mais toujours avec ce son très rock qui reste la base de notre musique.» Un nouveau son qu'il va falloir transposer à la scène : «C'est toute l'idée de Welcome to Humanoid City: ce n'est pas un simple décor que nous transportons de salle en salle, mais une vraie ville! Les nouveaux arrangements entraînent aussi quelques changements d'instruments. Mais là, je ne veux pas trop en dire, sinon ceci: attendez-vous à quelques surprises...»
Les aléas d'une carrièreLa première surprise, c'est d'apprendre qu'il reste des places pour le concert d'ouverture de la tournée, le 22 février au Grand-Duché. Alors que les réservations ont été ouvertes fin octobre et qu'en d'autres temps, les six mille places auraient été vendues en quelques jours. Comme dans le cas de toutes les bêtes de scène (Rammstein, Prodigy, Mika, Pink, etc.) qui se succèdent à la Rockhal ces temps-ci. De là à penser que le «phénomène Tokio Hotel» s'essouffle, il n'y a qu'un pas que les experts en show-biz n'hésitent pas à franchir.
Que feriez-vous, les gars, si les choses tournaient mal?: «Ça ne serait sûrement pas la fin du monde! Dans une carrière, il y a des hauts et des bas, on trouverait déjà un truc pour repartir du bon pied... À nos débuts, on était déjà le groupe le mieux payé de notre région: on sait se débrouiller, t'en fais pas!», répondent les jumeaux à l'unisson. Dans la foulée, le manager nous signale, de façon impeccablement robotique, que nos sept minutes sont écoulées.
Fin de l'entretien. Pour plus de détails, se tourner vers les rubriques
people. Où l'on apprend que Tom est accusé par l'une de ses admiratrices françaises de l'avoir frappée pour l'avoir «harcelé» avec un peu trop d'insistance. Ou que Bill a désormais une copine qui s'appelle Pinky qu'il aurait piquée à un certain Dennis. Ce qui devrait couper court aux rumeurs d'homosexualité concernant le chanteur, mais n'en fait pas un ange pour autant... Mais pourquoi les gens ne s'intéressent-ils donc pas simplement à la musique?
Source: http://lequotidien.editpress.lu/les-loisirs/8644.html