[T] Aime-moi, Anna...aime-moi. I

Je me sens vide sans elle. Vide et inutile. Mais je fais bonne figure.
Ce serait vraiment mal venu de ma part de me plaindre de quoi que ce soit. Oui parce que le départ d'Anna a rendu Tom complètement dingue.
Alors j'accumule la peine, le manque, et toutes sortes de sentiments qui me bouffent de l'intérieur. Mais que faire ?
Tom déprime, et en veut au monde entier. Il ne remontera pas la pente, pas sans elle.
J'ai mal pour eux deux, ou devrais-je dire, pour eux trois. Bill va de moins en moins bien.
Voir son jumeau aussi malheureux, et surtout se faire constamment rejeter par lui, alors qu'Anna est partie
justement pour qu'il puisse se rapprocher de son frère, tout ça le rend de plus en plus fragile.

Il est méconnaissable : les traits tirés, son air angélique si parfait d'habitude à disparu.
Il semble complètement détruit, et peu importe le maquillage, le soin de la coiffure...rien n'arrive à gommer sa tristesse.
Il plante ses yeux dans les miens, et fond en larmes. Il tremble, tellement que ses jambes flanchent.
Je le prends alors dans mes bras, et nous restons là dans sa chambre, jusqu'à ce que ses sanglots se calment,
et qu'il tombe dans un sommeil profond.
Il faut que Tom se reprenne. Il faut que Tom comprenne. Il faut qu'il réalise que sinon, il va tout perdre.
Son frère, ses potes, et Anna.

[…]

Alors là...il dépasse tout les records de connerie. Faire une overdose de viagra...n'importe quoi.
Qu'il boive, passe encore, même si j'en ai ma claque d'aller le choper dans des endroits louches à point d'heure tellement il est cuit.
Qu'il fume encore plus de clopes qu'avant, passe encore...j'm'en fous, je fume aussi.
Mais le viagra. L'idée même qu'il ait envisagé de coucher avec une autre qu'Anna me dégoûte de lui.
On dirait qu'il régresse...qu'il veut oublier tout ce qu'elle lui a apporté : le calme et la stabilité.
La douceur et la tendresse aussi. On dirait que de tout ça...il s'en fout royalement maintenant.

Mes nerfs lâchent. Et je m'enferme dans ma chambre, chambre si impersonnelle que je partage avec le bassiste,
dans cet énième hôtel qu'on côtoie. J'en ai marre de bouger tout le temps. Mes seuls repères, ce sont elle et ma famille.
Donc, loin d'eux, plus rien ne va. J'ai besoin d'un break. Mais le groupe a besoin de moi...tiens bon Gustav, bientôt, tu pourras aller voir Anna.
Bientôt je la serrerai dans mes bras. Bientôt je sentirai son parfum si délicat...

[...]

Septembre. Trois mois que depuis l'overdose de Tom. Un peu plus que je n'ai pas vu ma petite poupée.
Anna a l'air d'aimer son école. Un peu trop même.
Enfin, le fait qu'elle s'y plaise ne me dérange pas, elle est tellement douée que ce serait une erreur de ne pas travailler ce don.
Mais je n'aime pas Matteo. Kat m'en a parlé plusieurs fois. Et j'ai bien peur qu'il ne prenne ma place. Et celle de Tom.
Ou les deux. D'ailleurs...

Je sens dans sa voix une pointe d'agacement face à mon attitude.
Je suis un peu inquiet. Bon d'accord, très inquiet...ok, très très très inquiet.

Je cogite et m'étouffe presque en réalisant ce qu'elle sous-entend par là.

Bordel de merde. Bordel de meeeeeerde. Comment je vais la récupérer moi, si le nabot prend ma place ?
Une sorte de panique m'envahit, une peur de la perdre pour toujours, m'étreint le cœur tellement fort qu'on dirait qu'elle cherche à l'étouffer.

Bill me fait sursauter en criant comme un fou derrière moi :

- Quoi ??? Elle veut se taper Matteo ??? Et mon frère, hein ? Et mon frère elle en fait quoi ???
- J'en sais rien Bill, chuchoté-je.
- Comment ça t'en sais rien !!! Tu devrais savoir bordel !!!

Katerin a tout entendu. Et forcément, quand Kat entend des trucs qui ne lui plaisent pas...c'est la tempête.

Je ne sais plus quoi penser.
J'aime Anna, mais suis-je égoïste au point de l'empêcher d'être heureuse avec un autre que moi ?
Je crois bien que oui. J'ai déjà du mal à admettre que son cœur appartienne à Tom, que je connais depuis longtemps,
alors si je devais en plus imaginer qu'elle l'offre à quelqu'un d'autre, totalement inconnu...

[…]

Bill n'est pas là aujourd'hui. Il m'a dit de ne rien dire à Tom, pour qu'on voit si il s'inquiète.
On a remarqué que ces derniers jours il se comporte de façon étrange, comme si il avait conscience que quelque chose n'allait pas.
Il est donc parti ce matin, et rentrera tard ce soir. Chez sa mère m'a-t-il dit. Je sais pas pourquoi, mais j'en doute.
Mais bon, il m'a promis qu'il n'irait pas voir Anna sans moi. Je le tuerai s'il le faisait, de toute façon.
Non, je ne suis pas violent de nature. Enfin presque pas.
C'est juste qu'il faut que je m'entretienne avec le nain de 17 ans qui a des vues sur ma petite Anna.
Qu'il comprenne qu'il est de trop dans la partie.

Sa voix traduit une certaine inquiétude. Bill avait raison, donc.

[…]

2 heures du matin. Tom est inquiet. Il est blanc comme un linge, et panique parce que Bill n'est pas rentré...
et aussi parce qu'il ne répond pas à son téléphone.

Il s'avachit sur le canapé, à côté de moi, complètement dévasté.
Il me regarde, tristement, les larmes entamant ses joues.

Il sèche rapidement les gouttes salées qui s'aventurent encore sur son visage, et me souris faiblement.

Tom va mieux. Il va enfin mieux. Je me sens encore plus soulagé lorsqu'il se met à rire avec moi

Je me dirige donc vers sa chambre, et m'étale comme une crêpe sur son lit,
tellement je suis épuisé par tout ce qu'il vient de se passer. Tom a retrouvé le sourire. Ça veut dire que Bill aussi, non ?
Ce serait tellement bien que tout revienne à la normale entre eux...ça voudrait que tout redeviendrait normal dans le groupe.
Et ça, ça nous ferait à tous beaucoup de bien.

[...]

6 heures du matin. Tom n'a pas dormi de la nuit. Il tourne en rond dans son salon, et j'ai eu du mal à fermer l'œil,
puisqu'il n'a pas cessé de jurer, un peu trop fort à mon goût. J
e suis encore dans le pâté, lorsque Tom hurle mon nom. Je panique, et cours au salon.
Il est au téléphone, et appuie sur haut-parleur dès qu'il me voit. Il n'a pas l'air très content. Bon ok, il à l'air très très très en colère.

Ou du moins, pas que je sache...

Dans le genre réveil tordu qui met le cerveau en vrac...

Donc, il m'a menti. Il m'avait juré, juré qu'il n'irait pas sans moi.
Putain...mais quel connard !

Le reste de la conversation, je le passe à cogiter. Mes intentions sont donc tellement prévisibles ?
Je suis pathétique. Un gros égoïste pathétique. Il va falloir que je remédie à ça.
Que j'arrête de croire qu'Anna est la femme de ma vie...elle est trop amoureuse de Tom.
Elle l'a dit elle-même, pour rassurer ce débile qui n'a fait que l'insulter. L'insulter de pute en plus.
Mais enfin...je sais plus quoi penser. Il faut que je change. Que tout change.

[…]

J'ai pas dormi la nuit dernière. Je suis en pleine remise en question.
J'ai l'impression, ces derniers mois, d'avoir plus voulu que tout redevienne comme avant, entre Anna et moi,
simplement parce que j'avais peur de ce qui m'attendait. Simplement parce que j'avais peur d'être seul, pour toujours.
Mais il ne faut plus que j'ai peur. Ce matin, David nous attend, et Georg me dépose en bas de chez les jumeaux, pour que j'aille les chercher.
Lorsque j'arrive, Bill est déjà prêt et lit un magazine de mode dans le salon.
Il me sourit, et m'annonce que son frère dort encore.

Je me dirige donc d'un pas assuré vers sa chambre.
Pourquoi je n'aime pas du tout le ton que Bill a employé ? J'ouvre la porte, et crie presque pour le réveiller.

Et là, je commence à avoir un sentiment étrange. Je suis en colère.
Mais ce corps frêle à ces côtés me dit quelque chose...et si...si c'était elle ?

Et là...mon coeur s'arrête. Tout ce que j'ai pu sire sur le fait d'oublier Anna vole en éclats.
Je suis comme électrisé par sa voix, que je chérie tant. Pas possible. Ça ne peut pas être elle.

Quoi ? Je suis donc tellement obsédé par elle qu'elle m'apparaît comme ça , en plein milieu de la chambre de Tom ?
Une panique m'envahit, à mesure que je crois être gagné par la folie.

L'androgyne accourt à mes côtés, complètement paniqué.

Anna se lève et me saute dans les bars, comme pour m'assurer que sa présence n'est pas le fruit de mon imagination.
Mon cœur implose de joie, et moi je ne ressens rien d'autre qu'un poids énorme s'envolant de ce dernier...

J'ai retrouvé mon cœur. La glue pour en recoller les morceaux.
Je me sens léger. Je me sens heureux. Je me sens...moi.
Et ça faisait longtemps que c'était pas arrivé.