[T.] Aime-moi, Anna...aime-moi. II

Voilà une bonne semaine que je n'étais pas sortie de chez moi.
Une semaine que je pleurais, que je me laissais aller.

Je me levai et allai ouvrir, avant de retourner dans mon lit.
Je pleurais, encore, et elle semblait impressionnée que je réussisse à me repérer dans le noir.
Elle se dirigea vers la fenêtre la plus proche, l'ouvrit en grand et contempla l'étendue des dégâts.

Elle acquiesça.

Elle ne dit rien, et me sourit.

Elle me prit doucement dans ses bras.

Elle me fit la bise, me sourit une dernière fois et s'en alla, me laissant seule face à mon désespoir le plus total.
Face à moi-même, à ma lâcheté, à ma tristesse.
Je connaissais bien ce sentiment, et je n'aimais pas ça du tout,
parce que je me rappelai de quand je l'avais ressenti de manière aussi forte pour la dernière fois.
C'était il y a trois ans. Et j'avais cette foutue cicatrice qui me marquait tout flanc gauche pour m'en rappeler.
Les larmes affluèrent de nouveau, et je n'essayai même pas de les stopper.
Mon cœur semblait pris dans un étau qui se resserrait à mesure que je pensai à Tom et sa blonde.
Je ne pouvais plus supporter tout ça. Je ne pouvais plus me supporter. Je n'aurais jamais dû les recontacter.
Tout ce que cela m'avait apporté était un chaos total dans ma tête, et une tempête dans mon coeur.
J'avais perdu Matt malgré moi, j'étais retombée sous le charme de Tom, malgré moi.

Soudain, tout se mit à tourner autour de moi,
et je réalisai que cela faisait deux jours que je n'avais pas fait de vrai repas.
Toujours sanglotante, j'essayai de me diriger vers mon lit, mais après quelques pas,
mes jambes cédèrent, et je ne fis rien pour empêcher ma chute, ma tête heurta le sol la première, et...
c'est avec un plaisir immense que je ne ressentis plus rien.

[…]

Je me réveillai tout juste, et sentis mon mal de tête insupportable.
J'avais l'impression qu'on frappait à coups de marteaux dans ma boîte crânienne.
Je sentis le sol sous moi, et me rappelai vaguement de la façon dont j'étais arrivée là.
J'avais faim. Vraiment faim.
Je me dirigeai donc dans mes placards, pris la boîte entière de céréales, le pain de mie, le nutella, une cuillère à soupe...
et m'en donnai à cœur joie. Je n'avais rien d'autre à faire.
J'allais également chercher la boîte d'aspirine, car ma tête résonnait, à presque m'en donner des nausées.
J'avais passé, pour la première fois depuis quelques semaines, une excellente nuit.
Je me sentis alors presque coupable de vouloir m'affamer à un tel point que ça recommence.
Mais ne plus penser à lui, à nous, pendant aussi longtemps...quel bonheur...quel soulagement.
Mais ma vie me semblait tellement vide, vide de sens,
que mon mal-être de la veille ne mit pas longtemps avant de revenir m'étreindre une fois de plus,
de façon tellement oppressante que j'eus une subite envie de ne plus penser à rien.
Mais impossible de m'ôter son image de la tête.

Une impression désagréable remua mes entrailles,
une sensation de dégoût parcourut entièrement mon corps, si bien que je me précipitai dans les toilettes,
me laissai tomber à genoux devant la cuvette et vomis tout ce que j'avais avalé quelques minutes auparavant.
Je me forçai même vers la fin, parce que mon corps se vidait d'une façon qui, malgré le côté rebutant du début,
m'allégeait d'une façon agréable. J'avais l'impression de sortir ce qui n'allait pas de moi, je me sentais bien.
Je ne compris pas ce qui se passait, j'avais juste envie de recommencer. Je me fis peur.

Heureusement quelqu'un frappa. Je me levai, pâteuse, me passai de l'eau fraîche sur la figure,
et me brossai rapidement les dents.
J'ouvris la porte. Et là, j'eus juste envie de mourir.

Tomichou ?
J'eus du mal à me retenir de rire. Quel surnom ridicule.
Je pouffai, sous le regard médusé des deux autres.

Il me détailla du regard, et bloqua, une fois de plus,
sur la bague que je portais, tel un fardeau, autour de mon cou.

Elle me dévisagea, avec dédain.
Ma pauvre fille, si tu savais à quel point je te hais...

Je fermais la porte, et m'effondrai contre celle-ci. Je ne savais plus quoi penser.
Comment osait-il venir frapper à ma porte avec elle à son bras ? Comment osait-il venir tout court ?
J'explosai en larmes, hurlant de rage.
Ces explosions intervenaient souvent lorsque je désespérais totalement. Ce qui était présentement le cas.
J'avais mal, mal de l'aimer, mal de le vouloir,
mal de ne rien trouver d'autre à faire que hurler, en espérant que cela m'apaise.
On tambourina à la porte de nouveau.
J'étais toujours contre elle, à pleurer toute les larmes de mon corps, sentant les coups s'accentuer,
jusqu'à en faire vibrer la cloison en fer pourtant massive.

Je ne répondis pas et hurlai de plus belle.
Je saisis le premier truc qui me vînt sous la main – un vase posé sur une petite table dans l'entrée –
et le lançai contre la porte, contre laquelle il se brisa.
Et m'effondrai encore, à genoux cette fois, à l'entente de sa voix qui s'époumonait de l'autre côté.

Je ne continuai pas cette conversation,
laissant tout simplement échapper un cri hystérique d'entre mes lèvres.
Il ne devait pas rester là. Il ne valait mieux pas. Et pour lui, et pour moi.

Il semblait réellement touché. Et moi, j'avais besoin de lui.
Malgré toute la souffrance que lui ouvrir m'apporterait, je ne pus m'empêcher de céder.
La porte ouverte, je le vis blêmir à mesure qu'il se rendit compte de mon état.