Une flaque de sang entoure à présent son cadavre laissé à l’abandon au pied de la baignoire.
C’est la dernière fois. Il se l’est promis. Il lui a promis. Plus jamais il ne touchera à ce poison qui le détruit jour après jour. Cela n’a fait que ruiner sa misérable vie mais le pire, c’est qu’il l’a entraîné dans sa propre chute. Et ça, il ne le conçoit pas. Car elle n’a rien fait dans le fond, si ce n’est l’aimer, comme personne ne l’avait aimé avant elle.
Depuis combien de temps est il là, à méditer sur ce qui vient de se passer ? Aucune idée. Les heures n’ont plus d’importance. Plus rien n’a d’importance parce qu’elle est partie. Oui, elle ne pouvait plus vivre ainsi. Et lui, lui n’a rien fait pour la retenir car à quoi bon ? Il a menti. Il lui avait promis. Mais la promesse était bien trop lourde pour être respectée. Il devait arrêter, définitivement. Tout jeter, toute la came rangée un peu partout dans leur appartement.
Elle est rentrée de son travail plus tôt que d’habitude, si pressée de le retrouver. Et là, elle l’a vu. Assis sur son lit, une seringue dans une main, le garrot sur le bras gauche. Tout s’est ensuite déroulé très vite, sans qu’il ne puisse rien contrôler. D’abord, elle a crié, puis s’est brutalement énervée pour finalement fondre en larmes. Elle n’a pas supporté cette vision, cette déchéance dans laquelle il se complaisait tant. Elle est sortie en courant de l’appartement, ne regardant même pas où elle allait, les yeux encore brouillés de larmes. Un crissement de pneu.
Il sort à son tour et la voit, à quelques mètres du camion qui l’a percuté, morte. Il ne pleure même pas, il ne ressent simplement rien. Il ne ressent rien car les effets de l’héroïne ne se sont pas encore dissipés. Bientôt, une masse de gens s’affère autour de la victime. Il revoit la scène, encore et encore. Son cœur se noue quand il réalise qu’elle n’est plus là et qu’elle ne reviendra pas. La seule personne qui le rattachait à cette Terre, la seule pour qui il comptait vraiment.
Il se sert une vodka glacée, et marche dans l’appartement qui est à présent vide de sens. Tout comme lui. Il entre dans la salle de bain et jette un coup d’œil au miroir. « Tu fais vraiment peine à voir » pensa t il. Il prend une lame posée sur le rebord du lavabo et la regarde longuement, comme hypnotisé. « Tu me l’avais juré ! », ce sont les dernières paroles qu’elle lui a craché au visage, dans un sentiment à la fois de haine, de dégoût et de tristesse. A cette pensée, il plisse ses yeux pour retenir les larmes qui commencent à couler malgré lui.
D’un geste qui se veut ferme mais qui est pourtant tremblant et incertain, purement du à son désespoir, il enfonce la lame dans son poignet. Le sang commence doucement à s’étendre sur sa main mais pas assez vite à son goût. Il ne veut plus rester là, à survivre seul et faire face à ses responsabilités ; non, il n’en ai pas capable. Il attrape les glaçons dans son verre de vodka et les frictionnent sur sa plaie ouverte. Le sang coule plus abondamment. Il commence à voir flou et prit d’un vertige, il s’assit parterre.
Une flaque de sang entoure à présent son cadavre laissé à l’abandon au pied de la baignoire.